Des amis qui ont bien connu Jean-Pierre ORTHOLAN, m'ont envoyé des écrits à son sujet et je ne peux résister au plaisir de vous les partager, tant d'après moi ils décrivent bien le Jean-Pierre que j'ai connu lors de l'exercice de son ministère à Marmande...Il savait "sortir de son église" déjà à cette époque, il avait déjà compris que comme le Pape François nous le recommande aujourd'hui, il faut savoir ouvrir nos portes et aller vers le monde extérieur.
Je vous diffuse le texte écrit par Jérôme POMIÉ qui lui voue une grande reconnaissance pour l'aide et le témoignage que Jean-Pierre lui a apportés , je vous laisse savourer ce texte et le tableau de Jean-Pierre que Jérôme nous dévoile...
Patrick
Cher Jean-Pierre,
Ce matin, avant la messe du Christ Roi où nous célébrions les 20 ans de la paroisse Sainte Foy, ton successeur, l’abbé Nicolas Richer a annoncé ton décès. Quelle joie doit être la tienne d’entrer en cette fête anniversaire dans la joie de ton Maître ! Quelle tristesse est la nôtre !
Si je devais te résumer en un seul mot, tout en te priant de m’excuser pour cette réduction, ce serait l’adjectif « passionné ».
Tu es passionné du Christ . Tu as voulu suivre Jésus-Christ en lui donnant ta vie dans le sacerdoce. Tu as été configuré à lui comme prêtre et tu es entré dans notre famille du presbyterium d’Agen. Tu as eu le souci de le faire connaître et de le faire aimer. Quand tu étais curé d’Agen, sur le tableau de bord de ta voiture une feuille portait cette inscription : « prêtre en service ». S’il est vrai qu’ainsi tu stationnais presque n’importe où, il n’empêche que tes arrêts pouvaient être de courte durée … Tu étais un prêtre en service car tu étais un « prêtre en sortie » comme aurait pu le dire de toi le Pape François. Tu voulais porter la Bonne Nouvelle du Christ à tous, et pour toi l’homélie du dimanche avait une importance toute particulière. Sur la table du petit déjeuner du lundi matin à Villeneuve, il y avait le journal et le Prions en Eglise . Tu lisais les nouvelles pendant le petit dej, tout en les commentant. Tu savais sans doute que j’aurai quelques minutes de retard … Pour te faire patienter, tu lisais la Parole de Dieu qui retentirait dans nos églises le dimanche suivant. Toute la semaine, tu méditais ces textes. Le dimanche, la Parole de Dieu avait infusé dans ton cœur de Pasteur et, sans papier, le micro à la main là où c’était possible au pied du chœur, dans la nef, tu prêchais. C’était simple et admirable. Tu avais des tournures de phrase bien à toi, et l’intonation de ta voix ne cachait pas cette passion qui était la tienne. Pendant les mois
d’été, j’aimais venir concélébrer avec toi le dimanche soir à Peyragude. Ces dernières années plus spécialement, ta passion du Christ, tu l’as vécu à l’école de la Vierge Marie, dans le Villeneuvois, à la Pierre aigüe. Notre-Dame de Peyragude que tu as voulu mieux faire connaître, davantage aimer des touristes et des pèlerins : semaine mariale, vêpres, chapelet, procession, dessins ou mots des enfants. Elle nous conduit vers son fils : « nous venons vers toi, pauvres pèlerins. La route est parfois si dure, dure aussi la vie, prends-nous par la main ». Tandis qu’il était inconscient dans son lit, et ça a duré plusieurs mois, à la Maison de retraite de Penne, tu rendais visite à ton ami l’abbé Verninas. Tu lui tenais la main, tu lui racontais ce qui t’occupait en ces heures et avant de tracer sur son front le signe de croix, tu disais un « Je vous salue Marie ». Je suis touché par ta foi.
T u e s p a s s i o n n é d e l’ E g l i s e . Pour toi, il n’y avait pas d’adhésion au Christ sans une adhésion à l’Eglise. Tu as été un acteur de l’Eglise diocésaine comme curé, doyen, vicaire épiscopal. Tu pouvais ne pas être d’accord, tu aimais interroger, peut-être même débattre, mais tu restais fidèle. Ta vie est marquée par l’Action catholique et l’accompagnement de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne. Serviteur simple comme dans l' Évangile, tu avais cette conscience de ne faire que ton devoir. Tu aimais lorsque nous parlions de la JOC et pourtant, jamais tu n’as interféré dans la mission qui était devenue la mienne. Tu militais pour une Eglise en sortie, joyeuse et festive. En 2000, tu lançais le journal Foy d’ aujourd’ hui qui était distribué gratuitement à 7000 exemplaires dans la ville. Tu avais voulu une messe de la nuit de Noël au Stadium. Des délégués de chaque communauté qui portait une intention particulière, partaient de leur église à pied, dans la nuit, incarnant des personnes de la crèche. Tous se rassemblaient au Stadium pour célébrer la veillée. Tu investissais aussi le stadium pour une grande fête de la Profession de foi des jeunes de la paroisse et des collèges catholiques. Nous nous rappelons bien sûr des rassemblements diocésains au Parc des expos : Pentecôte 2000, clôture du jubilé de Sainte Foy, Fête de la fondation des 26 Paroisses : tu étais un organisateur. Tu as organisé aussi la logistique des ordinations épiscopales de Messeigneurs Descubes et Herbreteau. Tu t’es dépensé sans compter pour la fondation des nouvelles paroisses, leur organisation et tu as montré l’exemple par la création de la première, Sainte Foy d’Agen, communion de communautés. Tu étais un bâtisseur. Tu voulais pour ceux qui se rassemblaient en Eglise dans l’église de la propreté, de la beauté. Tu étais même capable de changer un bouquet de fleurs juste avant la messe. Tu as veillé sur les travaux de ta chère cathédrale à l’horizon du grand Jubilé de l’An 2000 où tu accueillis toutes les paroisses, des mouvements, des services de notre Diocèse pour passer la Porte Sainte. Tu as même fait ouvrir le caveau des évêques deux fois pour les obsèques de Mgr Johan puis de Mgr Maury. Je suis touché par ta fidélité.
Tu es passionné des hommes et des femmes de n o t r e t e m p s . Pour toi, l’Eglise n’a de raison d’exister que si elle est au service de notre monde parce que Dieu aime ce monde. Tu savais écouter, discerner. Tu savais aussi trancher et si ton autorité t’a attiré quelques fois des inimitiés, souvent elle a forcé le respect. Tu étais tout spécialement sensible aux milieux populaires, toi qui fus l’apprenti pâtissier et tu aimais nous rappeler cette parole de Cardijn : « un jeune travailleur vaut plus que tout l’or du monde, car il est fils de Dieu ». Pour autant, tu ne t’es pas enfermé dans une idéologie qui aurait mis de côté tel ou tel milieu. Tu étais sensible aux souffrances de ceux que tu rencontrais. Je t’ai parfois vu affecté par des erreurs commises, et entendre dans ta voix s’échapper une grande compassion pour ceux qui les avaient commises. Tu étais aussi passionné par l’histoire des gens, la culture, notre terroir. Tu t’intéressais à l’art, au fait politique, à la cité. Après la lecture de l’ Évangile, en EAP, chaque délégué donnait des nouvelles de son quartier. Tu participais à un atelier de partage et de réflexion philosophique. Tu étais très proche de tes « frangines », de leurs époux, de leurs enfants et en même temps, tous nous devenions ta famille. Je suis touché par ton amitié.
Pour tout ça Jean-Pierre, merci ! Pour toutes les fois où je t’ai agacé, pardon ! Et s’il te plaît, sois encore là dans les bons comme dans les mauvais moments.
Si tu as été passionné par le Christ, l’Eglise, les hommes et les femmes de notre temps, c’est parce que tu es passionné de la Vie . D’ une part, ton combat contre accident et maladie en sont la preuve. D’ autre part, tu achèves ton pèlerinage sur la terre sans avoir accompli tous tes projets. Tu les laisses à d’autres. Et si je voyais en toi le roc sur lequel je pouvais m’appuyer, ta mort me redit que le seul roc sur lequel s’appuyer, c’est Dieu. Ces dernières semaines tu étais plus silencieux, non que tu étais inquiet, mais tout devenait plus intérieur. Tu continuais à t’abandonner. Tu t’y étais formé ou préparé au cours de tes derniers déménagements. Tu te détachais, tout en remplissant ma bibliothèque. Un jour à ma question, « quoi de neuf ? », tu m’as répondu : « tout est neuf, Christ est ressuscité ! » Je suis admiratif de ton espérance. Ces dernières semaines, Marie t’a tenu par la main. Sa prière t’accompagnait et je veux croire qu’elle était là cette nuit « à l’heure de ta mort », elle t’a tenu par la main pour te faire entrer dans la Vie.
Tu m’as appris qu’on n’était pas là pour faire du nombre, mais qu’on était là pour dire à chacun qu’il est aimé de Dieu. Alors, même si l’Apôtre nous redit de ne pas pleurer comme ceux qui n’ont pas d’espérance, et bien je pleure ton départ annoncé mais tellement soudain.
Cher Père, Cher frère, Cher ami, pars vers Dieu qui t’appelle et dans l’espérance de la résurrection, à bientôt.
Jérôme Pomié.
commenter cet article …